Bilinguisme

Anita, française en Espagne (famille bilingue)

Je vous livre aujourd'hui le quatrième interview de la série dédiée aux témoignages de parents d'enfants bilingues. C'est au tour d'Anita de répondre à mes questions. Vous le verrez, Anita tient vraiment au caractère bilingue simultané précoce et biculturel de ses enfants !

1. Bonjour Anita, pourrais-tu te présenter ?

Je suis française, née à Laval où se trouve toujours une partie de ma famille. J’habite en Espagne à Logroño depuis 2001 où je suis actuellement professeure de français à mon compte. Mon mari est espagnol. Sa famille habite loin de Logroño dans le Sud-Ouest de l’Espagne. Nous avons 2 filles, Iloane née en 2010 et Taïs née en 2018. Intéressée par les langues depuis toute petite, je suis fascinée par le plurilinguisme et notamment celui de mes enfants ! J’ai beaucoup lu sur ce sujet, quelques livres (on a vite fait le tour) et surtout blogs de parents. J’ai commencé à raconter le bilinguisme de mon aînée sur mon blog

Famille bilingue franco-espagnole

2. Tu es maman d’un enfant encore bébé, penses-tu qu’il est important, voire indispensable, parler la langue maternelle dès que le petit haricot s’installe dans le ventre ?

Plus qu’indispensable, je dirais que pour moi ça a été une évidence. Avec mon mari nous avons communiqué en espagnol entre nous depuis toujours. Quand je suis tombée enceinte, ma vie était je dirais à 70 % en espagnol. Pourtant parler espagnol à mon petit haricot était juste impensable et impossible pour moi. Et à la naissance il était encore plus évident que le français serait la langue de communication entre ma fille et moi. Je suis même un peu « énervée » quand quelqu’un est surpris de cela ! Maintenant je réponds « toi quelle langue tu parles à tes enfants ? Ta langue, la langue de ton enfance non ? Bah moi c’est pareil, même si j’habite ici ».
Mais je connais (malheureusement) beaucoup de personnes pour qui, même si c’est important, la langue maternelle ne s’impose pas naturellement et ils doivent faire des efforts pour « installer » leur langue maternelle. Une amie qui vient d’accoucher est mariée à un brésilien. Lorsque le bébé était dans le ventre il n’arrivait pas à lui parler sa langue et depuis la naissance pour lui c’est plus facile. Je pense que ça dépend de chacun mais je suis persuadée qu’il faut commencer à parler la langue le plus tôt possible et surtout s’y tenir…
Je connais aussi des personnes qui ne réussissent pas à parler leur langue maternelle à leurs enfants, ni dans le ventre, ni après 🙁 et d’autres qui le font dès la grossesse puis de moins en moins et finissent par abandonner.

Ce qui est indispensable à mon avis c’est la constance, il faut parler sa langue tout le temps ou en tout cas le plus possible, même en public, même chez le docteur, même devant les profs, même devant la belle-famille et c’est une difficulté pour certains.

3. Ta fille aînée, est-elle consciente de son plurilinguisme ? Comment elle le vit auprès de leurs camarades ? Un moment bilingue rigolo, drôle ou, au contraire, triste à partager avec nous ?

Ma fille est totalement consciente de son bilinguisme, d’ailleurs si elle ne l’était pas, les gens le lui rappellent assez souvent par de petites réflexions… Ce sont souvent des compliments  mais pour elle pour qui c’est naturel, c’est assez déstabilisant quand quelqu’un vous dit « oh super tu as de la chance tu comprends tout ce que te dit ta maman…. ! » (bah oui je comprends ma maman heureusement!!)
Plus petite elle était déstabilisée aussi par les demandes de traduction qui étaient récurrentes et qui sont très compliquées pour des petits bilingues (surtout quand on leur demande de traduire des grands intraduisibles genre les plats du restaurant…)
Anecdotes, moments drôles, malentendus…il y en a beaucoup… alors je raconte la dernière en date. Nous faisons beaucoup les courses en France car nous passons souvent des week-ends à Hendaye et en profitons pour acheter des produits français. La semaine dernière sur un paquet de biscuits était écrit une petite devinette-blague :
« quand je suis chaud je suis frais,qui suis-je? » réponse: le pain.
En français bien sûr ça marche et ma fille avait bien compris la blague puisqu’on parle souvent de la baguette fraîche des boulangeries françaises. Toute contente de comprendre la blague elle l’a racontée aux enfants de sa classe en traduisant mais la pauvre a fait un bide total car en espagnol le jeu de mots ne fonctionne pas du tout…
Des erreurs sur les mots aussi, de moins en moins mais qui nous font encore bien rire. Ma fille est la championne des faux amis et a beaucoup inventé de mots avec un sens de la logique incroyable à mon avis. « papa, hemos ido a la posta para mandar la carta… » « maman,le chien m’a tchoupé » etc. j’en ai noté beaucoup sur mon blog.
Une autre anecdote rigolote…toute petite déjà et encore aujourd’hui ma fille parle plus fort en espagnol qu’en français. Je l’ai tout de suite remarqué mais je n’en parlais pas trop, puis plusieurs personnes l’ont remarqué. Et quand je vois les vidéos de ses premiers mots, c’est flagrant !

Plus que du bilinguisme, ma fille est surtout très consciente de sa « biculture ». Et c’est sans doute le gros avantage de l’éducation bilingue. Elle sait qu’il existe pas si loin des gens qui vivent d’une autre manière, qui parlent une autre langue oui mais aussi qui mangent différemment, qui connaissent d’autres chanteurs, qui conçoivent parfois le monde différemment…

4. Elle est scolarisée dans une école « normale » (ou pas), avez-vous eu affaire à des remarques de la part des enseignants ?

Ma fille est en école publique monolingue. Je précise car les écoles bilingues en Espagne sont nombreuses avec le gallego, catalan etc. La première année, la professeure m’a dit que en « lengua » (espagnol, donc) ma fille avait quelques petites difficultés sûrement dues au fait que je lui parle français mais rien de grave. Je suis persuadée que ce n’était pas du tout le cas, mais je crois aussi qu’en tant que maman bilingue on est vite offensée par ce genre de réflexion alors que pour les enseignants ce n’est qu’un commentaire parmi d’autres…

Par contre j’ai eu des réflexions de la part d’autres personnes et c’est important d’être sûr de soi et de savoir répondre à certains commentaires, surtout pour un 1er enfant les premières années.

5. En famille, quelle méthode, si j’ose dire, avez-vous installé en termes de langue et de communication ? Est-ce que les stratégies évoluent en fonction de leur âge et de chaque étape de la vie ?

La méthode est très simple et surtout totalement naturelle et constante : Quel que soit l’endroit où on se trouve, quel que soit l’entourage présent Papa parle toujours espagnol aux enfants et Maman parle toujours français aux enfants. Papa et Maman parlent le plus souvent français entre eux mais là il y a souvent des dérogations 😉 . Cela peut être parfois mal perçu, mais nous sommes restés sur cette « méthode ». Quelques périodes peuvent être difficiles notamment l’entrée à la crèche et à l’école ou quand les amis des enfants viennent à la maison.
Nous avons aussi la télé en français et cela a son importance car nous la regardons tous les soirs et ma fille a toujours connu la télé en français. Elle voit des dessins animés en espagnol seulement au cinéma ou à l’école. Même les DVD de la voiture sont en français ou en anglais. Pas de livres en espagnol non plus jusqu’à l’année dernière. Ma fille a commencé l’école primaire et donc la lecture, alors elle veut des livres en espagnol, ce que nous acceptons bien sûr. Nous nous tenons vraiment à cela tant que nous vivons en Espagne. Dans une prochaine étape, peut-être en France dans quelques années…il faudrait inverser et faire entrer plus la langue espagnole à la maison.

Famille bilingue franco-espagnoleFamille bilingue franco-espagnole

6. Je ne sais pas si vous le savez mais pour moi, une langue est bien plus qu’un simple outil de communication, une langue est un tout, une langue est famille et sentiments. Pour vous, une langue c’est…

Oh la la… vaste question… j’aime ton blog car je sais que tu ressens les choses comme moi je ne pense pas pouvoir l’exprimer mieux que tu ne le fais.

Une langue c’est tellement…c’est ton univers, ton enfance, tes souvenirs, les valeurs qu’on t’a transmises, les sentiments, les rêves, les épreuves traversées, les secrets racontés, des goûts, des odeurs. J’ai grandi, j’ai appris, j’ai découvert le monde avec cette langue, je ne conçois pas que mes enfants découvrent le monde sans leur transmettre cette partie de moi.
Deux exemples juste sur la journée d’hier :
J’ai récité à ma fille une poésie que j’avais apprise en primaire, elle était ravie !! et moi aussi !
Hier soir ma fille a demandé à ses grands-parents qu’ils lui rapportent des carambars et de la brioche lors de leur prochaine visite. Ce sont de petites choses qui paraissent insignifiantes mais je serais bien triste de ne pas partager cela avec elle.

7. Le quotidien d’une famille bilingue est difficile, facile… quels sont, d’après vous, les aspects sur lesquels il ne faut pas être intransigeant ? (s’il y en a, bien sûr)

Je pense que c’est très important de ne pas changer de langue selon l’endroit où on se trouve. Je vois beaucoup de familles autour de moi qui parlent l’autre langue à la maison mais dès qu’ils sont en public, école, jeux, médecin etc. ils parlent en espagnol. Dans toutes ces familles je constate que l’enfant ne parle pas la langue. Il la comprend mais n’est pas très à l’aise pour la parler. Je sais que ça fonctionne pour certains mais dans mon entourage ces enfants là ne sont pas bilingues car souvent ils ne s’intéressent pas à l’autre langue, l’autre pays, l’autre culture. Bien sûr tout dépend aussi de ce que veulent les parents. Certains souhaitent que leurs enfants comprennent et se débrouillent avec la deuxième langue pas plus. Ce n’est pas mon cas, je veux que mes enfants connaissent la France et le français dans toutes (ou presque) ses subtilités.

C’est important aussi d’aller dans le pays ou de faire des rencontres avec d’autres natifs pour qu’ils ressentent le besoin d’utiliser la langue, qu’il y ait de l’échange réel avec cette langue

8. Si on vous demandait des conseils pour élever un enfant bilingue simultané précoce, quelle expérience auriez-vous envie de partager ?

J’avais écrit un article sur mon blog sur les points qui me paraissent essentiels : l’attachement à la langue, le soutien du conjoint et de l’entourage, l’échange, le besoin, la constance et le temps passé à utiliser la langue. Je crois que plus on réunit de ces aspects plus on a des chances que le multilinguisme se mette en place.
Je pense aussi que c’est nécessaire quelquefois d’expliquer aux gens la démarche. Au début j’étais un peu « braquée » (genre « je parle comme ça que ça te plaise ou non ») . Mais j’ai compris que les gens qui se sont pas plongés dans les langues ne comprennent pas toujours. Alors j’explique et finalement les gens acceptent mieux en comprenant.

9. J’aimerais beaucoup connaître votre avis sur les familles monolingues qui décident d’élever leurs enfants dans le bilinguisme ? Qu’en pensez-vous ?

Je vais essayer de ne pas être trop « sévère »… c’est vrai que c’est à la mode ici en Espagne, j’ai autour de moi des parents qui se débrouillent bien (ou pas.. !) en anglais et qui parlent en anglais à leurs enfants. En tant que maman je trouve ça vraiment bizarre, artificiel, voire même ridicule dans certains cas dont j’ai été témoin…Pour moi une langue doit être enseignée par un natif alors encore plus quand il s’agit de transmission à ses propres enfants ! Je ne comprends pas comment font ces parents. Après 17 ans en Espagne je n’arrive même pas à parler espagnol à un bébé… la langue qui me vient est toujours le français ! J’ai un très bon niveau en anglais mais c’est grâce aux cours d’anglais de ma fille que j’ai appris des mots comme tétine, lingette, pot etc. et je ne serais pas à l’aise si j’utilisais l’anglais avec mes enfants au quotidien.

Mais surtout comment ces parents transmettent-ils leurs souvenirs, leur enfance, leurs sentiments… tout ce qui fait une langue comme on a déjà dit ? Comment se forge la complicité parent/enfant quand on utilise une langue qui n’est pas la sienne… ? J’avoue que ça me dépasse…

Par contre en tant que professeure je tempérerais un peu ma réponse sur le sujet. Les enfants acquièrent du vocabulaire utile et sont un peu plus à l’aise en classe de langues. Ils comprennent et c’est déjà un bel avantage. Alors malgré une prononciation parfois incertaine, l’effet sur l’enfant n’est pas négatif au niveau de l’apprentissage. Par contre au niveau relationnel et affectif je ne suis vraiment pas convaincue…

10. Envie d’ajouter un dernier mot ?

Oui. Quelquefois je pense que je suis peut-être trop « stricte ». Je ne parle jamais espagnol à mes enfants même en présence d’amis. J’ai peur que ça devienne gênant pour mon aînée quand des copains/copines viennent à la maison. Pour l’instant elle ne se plaint pas et traduit ce que je dis à ses amis avant que je ne le fasse. Mais je sais qu’un jour elle peut rejeter ça et ne pas vouloir ressentir cette différence à certains moments. Maintenant j’ai du mal à faire machine arrière mais le français tient une place très importante dans notre quotidien…peut-être trop…
Malgré tout j’ai l’intention de faire exactement de la même manière pour notre petite deuxième née il y a 3 mois. Je suis pressée de voir si le bilinguisme se met en place de la même manière pour elle et les changements qui devront se mettre en place si on déménage. En tout cas je suis ravie d’avoir tenu mon blog et de pouvoir raconter à mon aînée avec des souvenirs exacts ses premiers mots,et puis voir la manière dont mes filles vont communiquer entre elles va me permettre de mettre mon blog à jour !

Bilinguisme

Interview à Coralie : maman d’une famille plurilingue

Je continue aujourd'hui avec la série d'interviews que j'ai initié récemment à des familles bilingues (plurilingues). La première que vous pouvez lire ici en espagnol a suscité un grand intérêt, c'est pourquoi aujourd'hui je vous propose un autre portrait de famille plurilingue très intéressant. Les interviews sont publiés tour à tour en espagnol ou en français, selon la langue de la personne interviewée. Aujourd'hui, je vous laisse avec Coralie, maman d'une famille plurilingue qui habite en Espagne, à Grenade...
Témoignage famille plurilingue

1. Bonjour Coralie, pourrais-tu te présenter 

Je suis traductrice. Une petite fille de 6 ans. Française, je vis à Grenade.

2. Chez vous, il me semble, il y a bien plus que deux langues ? Vous vivez en Espagne mais vous êtes, tous les deux, de nationalités différentes ?

Chez nous, il y a 4 langues. Mon compagnon, Adam, est britannique. Nous nous sommes connus en Italie et donc, nous communiquons en italien. L’arrivée de notre fille (elle est née à Rome) a chamboulé notre mode de vie. À Rome, je parlais français au travail (je travaillais pour une école de langues tout comme mon compagnon) et avec des amis francophones. Mais à la maison, ce n’était qu’en italien. Quand notre fille est née, j’ai commencé à lui parler en français et son papa en anglais. Elle est ensuite allée dans une crèche à Rome. Puis, en 2013, nous avons décidé de changer de vie et nous sommes venus en Espagne. D’abord à Valence puis à Grenade. Et avec ce changement, l’espagnol est entré dans nos vies.
Aujourd’hui, la situation est la suivante. Je lui parle en français et elle me répond en français. Son papa lui parle en anglais et elle lui répond en anglais. Nous parlons entre nous en italien et parfois (quand le sujet l’intéresse 😉), elle nous parle en italien. À l’extérieur (école et activités), elle parle espagnol.

3. Votre fille, elle est consciente de son plurilinguisme ? Comment elle le vit auprès de ses camarades ? Un moment bilingue rigolo, drôle ou, au contraire, triste à partager avec nous ?

Elle est consciente de son plurilinguisme. Elle a compris qu’elle était « différente » très tôt. Lorsque nous sommes arrivés en Espagne, elle a dû batailler, trouver sa place. Elle se rendait compte qu’elle était « en retard » dans l’expression orale en espagnol. Aujourd’hui, elle n’a plus ce problème. Par la lecture, elle a récupéré ce retard, enrichi son vocabulaire et elle vit bien ce plurilinguisme. Elle sait qu’elle est avantagée. Les deux langues étudiées ici sont l’anglais et le français. Elle peut donc aider ses camarades (qui l’ont bien compris !). Dans son école, elle est connue comme la fille qui parle plein de langues.
Les anecdotes liées au plurilinguisme sont multiples. Quand elle était plus petite, elle inventait des mots. Si elle ne savait pas dire quelque chose dans une langue mais le savait dire dans une autre langue, elle faisait des mélanges du genre « Maman, je veux une helade ». Il y a des erreurs qui persistent. Tous les jours, je la corrige sur l’utilisation du pronom « elle » en français. Pour elle, elle l’associe au genre masculin. J’ai beau lui expliquer, la corriger, il n’y a rien à faire. L’influence de l’espagnol est trop forte. Elle dit donc « Lui, il m’a dit » en parlant de sa maîtresse ou d’une copine et « Elle, elle m’a dit » en parlant d’un garçon.

4. Elle est scolarisée dans une école « normale » (ou pas), avez-vous eu affaire à des remarques de la part des enseignants ?

Elle est scolarisée dans une école espagnole (una concertada). L’école est bilingue espagnol-anglais. Elle a donc plusieurs matières en anglais (sciences sociales, sciences naturelles, anglais, théâtre, musique et sports). Elle a reçu plusieurs critiques, enfin nous parents ! On nous a reprochés de lui « embrouiller » la tête.
En maternelle, elle était dans une école bilingue espagnol-français et je me souviens qu’en première année, elle n’avait pas la moyenne en français tandis que tous ses autres camarades avaient d’excellentes notes. Nous avons donc pris rendez-vous et nous sommes rendu compte que notre fille ne souhaitait pas parler français avec quelqu’un parlant principalement en espagnol et ne disant que quelques mots de français. Cela n’avait aucun sens pour elle. Elle associait donc sa maîtresse de français à une maîtresse d’espagnol. Pour nous parents, c’était une chose absolument ridicule. Il n’y a pas eu de remise en question de la part de la maîtresse mais bien, une humiliation de sa part. Car elle savait (pour l’avoir entendue parler) que notre fille parlait français mieux qu’elle !
Cette année, elle entend à longueur de journées « Cassie, ne dis rien car toi, tu sais ! ». Et pas seulement à l’école. Pendant les cours de danse aussi où les cours se font en espagnol et en anglais. C’est parfois difficile pour elle car elle ne doit pas dire les choses mais dès que personne ne sait, on l’interroge. Et être britannique, parler anglais, ne veut pas dire qu’elle sait tout dire en anglais ! Et malheureusement, les professeurs ne le comprennent pas toujours.
Dans deux ans, elle aura aussi des cours de français. Nous savons que son niveau de français sera trop élevé par rapport au reste de sa classe qui commencera tout juste à étudier le français. Avec l’anglais, c’est un peu différent. Tous les enfants ici font des cours extra d’anglais ou voient la télé en anglais. Ils sont donc habitués à écouter la langue. Le français, il faut l’admettre, c’est un peu différent ! Ainsi, quand nous l’avons inscrite, nous avons souligné le problème et le directeur a compris et sait qu’il faudra trouver une solution pour elle. Nous verrons à ce moment-là.

5. En famille, quelle méthode, si j’ose dire, avez-vous installé en termes de langue et de communication ? Et ce, depuis que votre fille est née ou alors vous avez changé de stratégie en fonction de son âge ?

J’ai déjà un peu répondu à cette question. Pour nous, dès le début, nous avons adopté la méthode : 1 langue – 1 personne. Et nous, nous y tenons. Et nous insistons. Elle est très critique avec le niveau de langue des personnes.

Elle n’hésite pas à corriger notre espagnol (en particulier, nos accents). Si quelqu’un lui veut dire deux mots en anglais juste pour pratiquer ou juste pour la faire parler, elle n’aime pas et souvent, elle se refuse de répondre. Tout comme, elle refuse de montrer ses capacités linguistiques : « Pourquoi devrais-je te dire des choses dans d’autres langues si tu ne comprends pas ces langues ? ».

6. Je ne sais pas si vous le savez mais pour moi, une langue est bien plus qu’un simple outil de communication, une langue est un tout, une langue est famille et sentiments. Pour vous, une langue c’est…

Elle a donc bien compris qu’une langue est un outil de communication qui t’ouvre des portes, qui te permet de partager des cultures.

Témoignage famille plurilingue

7. Le quotidien d’une famille plurilingue est difficile, facile… quels sont, d’après vous, les aspects sur lesquels il ne faut pas être intransigeant ? (s’il y en a, bien sûr)

Il faut insister au quotidien. Ne jamais céder. Dans notre cas, nous avons eu de la chance car aucun de nous d’eux est espagnol. Donc, il n’y a pas vraiment de langue dominante. J’ai des amies ici qui sont mariées avec des espagnols et elles acceptent que leurs enfants répondent en espagnol. Parfois, elles les corrigent mais ce n’est pas suffisant. Un enfant a besoin de constance. Il ne comprend pas qu’un jour, on lui interdit de répondre dans sa langue dominante et le jour d’après, on l’autorise.

8. Si on vous demandait des conseils pour élever un enfant bilingue simultané précoce, quelle expérience auriez-vous envie de partager ?

Il y a la communication orale, bien évidemment, mais aussi l’environnement. L’enfant doit pouvoir associer la langue à des choses, à des personnes, à des villes, à des monuments, à des expériences tout simplement. Il faut vivre la langue surtout quand on ne vit pas dans le pays. Nous emmenons Cassandra à toutes les expos possibles en relation avec la France, le Royaume-Uni et l’Italie. Il faut partager nos souvenirs.

9. J’aimerais beaucoup connaître votre avis sur les familles monolingues qui décident d’élever leurs enfants dans le bilinguisme ? Qu’en pensez-vous ?

C’est bien si c’est bien fait ! Le conseil que je donne est d’avoir une baby-sitter ayant comme langue maternelle la langue que l’on souhaite apprendre à l’enfant. Ceci pour plusieurs raisons : pour raconter des histoires, pour l’association 1 langue – 1 personne, pour les comptines (j’ai un très bon niveau en italien mais je ne connais pas toutes les comptines italiennes !). Et ensuite, renforcer avec les dessins animés en langue originale. La télé peut être un très bon outil d’apprentissage.
Par exemple, notre fille a une baby-sitter italienne avec qui elle parle, joue, chante, lit en italien.

10. Envie d’ajouter un dernier mot ?

Le plurilinguisme fascine mais fait peur en même temps. Dans un contexte difficile où beaucoup de politiques font le choix de se renfermer, je pense que le plurilinguisme est ce qui nous permet de nous ouvrir au monde. Quand nous parlons plusieurs langues et les recherches le montrent, nous sommes plus ouverts, plus curieux et donc plus tolérants. Voici ce que nous souhaitons transmettre à notre fille : la tolérance, la curiosité et l’ouverture.

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Bilinguisme

Comme sur la place de la ville (Enfants bilingues)

enfants Bilingues Nantes

Je pense ne pas avoir tort si je dis que le 8 avril dernier a été une belle journée pour les Rencontres d’Enfants bilingues Franco-hispanophones de Nantes.

Le 8 avril, nous avons battu un record de participation et même si je sais que la quantité n’est pas toujours synonyme de qualité, j’ajouterai aussi que la bonne ambiance de dimanche laisse entrevoir de très bons après-midis à venir pour nos petits bilingues en construction.

C’est toujours avec quelques papillons dans le ventre que je vis les heures qui précédent les Rencontres : la peur d’oublier quelque chose, le souhait de tout bien préparer et, surtout, avec cette envie très forte que les familles-repartent-avec-le-sourire

Certains d’entre nous se connaissent déjà très bien et d’autres pas encore. À chaque nouvelle Rencontre il y a de nouvelles familles et cela signifie que nous devons tisser de nouveaux liens.

enfants Bilingues Nantesenfants Bilingues Nantesenfants Bilingues Nantes

Des familles avec une envie commune : que leurs enfants consolident la langue espagnole

On était 14 familles, ce qui se traduit par un total de 18 enfants, 24 mamans et papas et même 1 grand-mère argentine!

J’ai l’impression que depuis quelques semaines, les familles franco-hispanophones de la région nantaise apparaissent comme par magie…

Chaque famille a une histoire différente avec le bilinguisme. Chaque famille, de par son histoire et sa construction, a créé une relation différente avec l’espagnol et cela se ressent chez les enfants. Comme je le dis toujours, dans le cas du bilinguisme simultané précoce, il N’Y A PAS de recette miracle, il n’y a pas de recette qui fonctionne mieux qu’une autre…

… Mais il est vrai qu’il faut toujours que les parents s’y intéressent et essayent de favoriser la création d’espaces dédiés où leurs enfants puissent développer la langue de façon naturelle
Enfants bilingues Nantes Enfants bilingues Nantes

Enfants bilingues NantesEnfants bilingues Nantes

« Comme sur la place de la ville »

« Comme sur la place de la ville », serait un peu la suite de la phrase « sans pression ni prétention », devise de nos Rencontres depuis sa création.

Parce que je crois fermement aux bienfaits linguistiques de ces lieux de rencontres, des lieux sans trop de règles ni obligations, des lieux où ils peuvent évoluer librement. Comme ils le feraient sur les places de nos villes en Espagne ou en Amérique du Sud.

Evidemment, nous les adultes, nous sommes là pour gérer un peu la Rencontre, lire des livres, jouer avec eux.

Le 8 avril, la Rencontre s’est finie par quelques chants en rond !

A très vite, à la prochaine !

Enfants bilingues Nantes Enfants bilingues Nantes

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