Interprétation

L’interprète de conférences : invisibilité et silence

L’interprétation de conférences est une profession souvent assez méconnue.

Généralement perçue comme un simple exercice de traduction simultanée, elle cache en réalité une complexité qui va bien au-delà de la maîtrise des langues.

Un aspect particulièrement intriguant de ce métier est le fait que, dans certaines configurations, l’interprète parle sans voir ni entendre son auditoire, ce qui modifie profondément la nature de son travail.

C’est pour cela qu’aujourd’hui, j’ai eu envie de vous parler d’une situation bien particulière : parler dans le vide ! Mais il s’agit, aussi, d’un article qui donne quelques premiers éléments pour avoir une vision globale du métier. D’autres articles suivront.

L’interprétation de conférences : les intentions et les nuances culturelles

Déjà, il faut savoir que travail d’un interprète de conférences ne se limite pas à une simple traduction de mots d’une langue source vers une langue cible. Tout comme le traducteur (écrit) ne se limite pas à traduire des (simples) mots. Il ne s’agit pas non plus de transmettre un simple message. Il s’agit, plutôt, de transmettre des idées, des émotions, des intentions et des nuances culturelles, tout en respectant le style et le ton du conférencier. Ce rôle requiert une agilité mentale, une concentration intense, et surtout une capacité à s’adapter rapidement à des contextes variés.

Lors d’une conférence internationale, l’interprète relie le conférencier à son audience multilingue. Il doit être capable de retransmettre le message de manière claire et fluide, en assurant que le contenu ne perde pas de son impact à travers la traduction. Cela nécessite une maîtrise non seulement des langues, mais aussi des domaines spécifiques de la conférence (économie, droit, sciences, etc.), ainsi qu’une solide préparation en amont.

Parler au micro sans auditoire : un défi unique

L’un des aspects les plus singuliers et exigeants du métier d’interprète de conférences est le fait qu’il doit souvent parler dans un micro sans percevoir son auditoire, ni même savoir si celui-ci l’écoute réellement. Ce phénomène se produit fréquemment dans des situations dans lesquelles les participants utilisent des écouteurs pour suivre la traduction dans la langue de leur choix.
Contrairement à un orateur classique qui peut ajuster son discours en fonction des réactions du public (hochements de tête, expressions faciales, applaudissements), l’interprète doit se fier uniquement à sa propre expertise. Ce manque de feedback direct peut créer un sentiment de déconnexion, voire un effet de « parler dans le vide ». Toutefois, l’interprète doit rester concentré, car, malgré l’absence de retour immédiat, son rôle est essentiel au bon déroulement de l’événement.

La gestion psychologique du « silence »

Parler sans savoir si quelqu’un écoute peut être déstabilisant. Cela implique de maîtriser une forme de résilience mentale. Contrairement à un conférencier qui reçoit des indices visuels et sonores de son public, l’interprète ne bénéficie d’aucun de ces repères. Il doit donc faire preuve d’une grande confiance en ses compétences et en son travail.

La solitude dans laquelle l’interprète se trouve peut, parfois, rendre le travail plus stressant. Lorsqu’il n’y a pas de signal d’interaction, il est naturel de se poser des questions : « Est-ce que le message passe bien ? », « Est-ce que le public comprend ? ». Pourtant, malgré ce manque d’interaction directe, l’interprète continue à jouer un rôle vital. Il doit maintenir une voix dynamique, claire et convaincante pour garantir que le message soit bien transmis, que quelqu’un écoute ou non.

Ce processus demande une excellente gestion du stress et une capacité à travailler de manière autonome. En somme, l’interprète doit apprendre à avoir confiance en son travail, même en l’absence de validation extérieure.

Le métier d’interprète de conférences est une profession complexe, qui demande non seulement des compétences linguistiques, mais aussi une grande capacité d’adaptation (nous sommes des caméléons), une préparation minutieuse et une résilience psychologique. L’absence de feedback direct, notamment lorsqu’il n’y a pas de public visible ou de retour dans l’oreillette, constitue un défi supplémentaire que seuls les professionnels les plus aguerris peuvent relever avec brio.

Ainsi, derrière le silence et l’invisibilité de l’interprète se cache une responsabilité immense : celle de garantir une communication fluide et efficace entre des cultures et des langues différentes !
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10 ans d’activité professionnelle à mon compte, et je me suis offert un cadeau

Le 4 janvier 2014, six mois après avoir commencé à poser les bases de mon projet et de ma prestation de services, j’ai cliqué sur le bouton qui me donnait accès au régime fiscal de la micro-entreprise et du régime micro-social.

J’étais auto-entrepreneure, j’avais une auto-entreprise. Plus moyen de revenir en arrière, il fallait foncer.

J’ai souvent expliqué mon parcours. Beaucoup d’entre vous le savent déjà : je fais partie de celles et de ceux qui n’ont pas voulu ou pas osé travailler à son compte dès la sortie de l’école. Je ne le sentais pas et plein d’autres expériences très enrichissantes m’attendaient : j’ai travaillé en tant qu’interprète et traductrice à Bruxelles auprès de l’UE pendant 3 ans, où j’ai commencé ma carrière professionnelle, c’était en 2005. Ensuite, j’ai travaillé en tant que salariée dans une start-up française, j’occupais un poste de responsable éditorial à l’international et traductrice web, à Paris. Et en même temps que tout cela, j’ai aussi été chroniqueuse pour un journal régional, fait des traductions littéraires avec le statut d’artiste-auteur, bossé les soirs et les samedis à l’Institut Cervantes de Bruxelles au point d’information, donné quelques cours d’espagnol.

Parce que j’aime travailler. J’aime travailler et je n’ai jamais voulu changer d’orientation. J’ai fait des études de langues, de philologie, de littérature, de civilisation, d’interprétation et de traduction (7 ans que j’ai passé sur les bancs de l’université). Et ce melting-pot est mon melting pot préféré.

Mon chemin professionnel s’est ainsi forgé, formé, fait, façonné. De mes 18 ans à mes 30 ans, j’ai vécu dans 7 villes différentes. Et je ne regrette pas une seule de mes expériences.

Qu’est-ce qui a fait que j’ose enfin franchir le pas du travail en indépendant ?

La vie. La vie elle-même.

C’était le moment, je le sentais. Et je suis aussi de celles qui pensent qu’il faut se fier à son instinct. Du moins, cela a toujours marché pour moi. En mai 2013, la naissance de ma fille a marqué un tournant. Je me suis sentie grande et prête. Beaucoup de gens me disaient que c’était cool parce que j’allais pouvoir garder ma fille à la maison ; s’ils croyaient que j’allais jouer aux poupées toute la journée, ils se sont bien trompés ! Ma fille, que j’aime plus que tout, évidemment, n’a pas été un frein au développement de ma carrière pro. Au contraire, elle m’a donné des ailes. Elle allait chez une assistante maternelle comme si je travaillais au bureau, cinq jours par semaine. D’ailleurs, elle était la seule à y aller les mercredi (je suis Espagnole, les mercredis off, ce n’est pas pour moi).

Et ainsi se sont écoulées dix belles années !

Dix années de beaucoup de traductions, et de quelques interprétations aussi. Mais un peu moins, parce que, forcément, ma fille qui était aussi ma force, a un peu ralenti mes missions en tant qu’interprète, parce que l’organisation, parce que loin de la famille et de grands-parents qui prennent le relai…

2024, c’est le passage au réel !

Depuis quelques années, l’idée de quitter le statut d’auto-entrepreneur me trottait dans la tête. Mais vous le savez, je ne me presse pas, mes décisions murissent longtemps avant de franchir le cap.

Le statut d’auto-entrepreneur, qui est très sympa et utile, a aussi ses limites.

J’ai commencé à consulter des experts-comptables. J’en ai vu trois. J’avais besoin d’avis de professionnels. De pouvoir comparer, d’écouter, de rentrer chez moi et réfléchir. Il parait que c’est un peu comme les psys, il faut trouver le bon, celui avec qui ça matche, comme on dit. Si ma mémoire est bonne, le premier expert-comptable, je l’ai vu en 2021. Vous voyez, j’ai pris du temps. Des trois experts, chacun avait ses idées, qui n’étaient pas forcément celles des confrères. Il y en a eu une qui ne comprenait pas pourquoi j’étais restée aussi longtemps avec le statut d’auto-entrepreneur, un autre qui me poussait à créer une société et enfin, j’ai trouvé le bon, celui qui parlait le même langage que moi : le passage au régime réel normal, en entreprise individuelle classique.

C’est donc en ce début d’année, le 4 janvier 2024, que j’ai officialisé la demande de changement de statut. J’ai trouvé que c’était une date symbolique, pile 10 ans plus tard avoir posé la première pierre à l’édifice. C’est un beau cadeau que je me suis offert !

(Et comme vous pouvez le constater, j’ai aussi mis du temps à écrire cet article…)

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Être interprète dans les festivals

C’est un fait, il n’y a pas une mission d’interprétation pareille. Les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Et c’est exactement cela ce qui est bien dans notre métier. On ne connaît pas la routine.

La semaine dernière, par exemple, après quelques jours à La Défense en mode CEE (Comité européen d’entreprise), j’ai filé direction la belle ville d’Angers pour travailler au festival de cinéma Premiers Plans.

Encore une fois, j’ai activé le mode caméléon intrinsèque aux interprètes : après les EBIT, investissements et holdings, j’ai enclenché le mode cinéma !

Cette année, c’est la lauréate catalane Carla Simón qui est venue à Angers pour parler de sa filmographie, notamment Estiu93 (Été 93) et Alcarràs (Nos Soleils, Ours d’or – 2022).

La préparation des festivals n’est pas une préparation quelconque

Les festivals, je les prépare à fond, car le public a toujours des questions surprenantes auxquelles il va falloir faire face avec sourire et audace. Oui, oui !

La salle 1 du Pathé a une capacité de plus de 400 personnes et je vous assure que la salle était comble, même qu’ils ont dû jouer des tours pour faire rentrer tout le monde !

Je me suis préparée en regardant tous les films de la réalisatrice Carla Simón, y compris ses courts-métrages et, en plus, je me suis intéressée beaucoup à sa vie (oui, ça a un côté people, j’avoue !) puisque ses films sont clairement liés à sa vie personnelle !

Savoir adapter la préparation (la documentation, mais aussi le mental) de la mission en fonction de sa typologie est extrêmement important dans notre métier.