Bilinguisme

Anecdote d’enfant trilingue

Lundi matin, à l’école, Thelma devait passer une petite consultation avec un médecin de la PMI pour vérifier que tout va bien au niveau des yeux et des oreilles (et tout va bien). Cette consultation était prévue depuis quelques semaines. Mais il s’est avéré que samedi, la varicelle avait fait sa terrible apparition. Au départ, j’étais très optimiste, le week-end n’avait pas été trop difficile, elle avait la super forme. Tout s’est compliqué dimanche soir avec l’apparition des démangeaisons et donc, une nuit assez désagréable. Bref, j’ai finalement décidé que ce n’était pas une bonne idée d’aller à l’école.

enfants bilingues

Alors voilà, j’ai commencé à déployer ma cape de wonder-woman maman free-lance qui travaille à la maison à l’étranger et je me suis faite à l’idée que la semaine serait sous le signe de la conciliation-intégration et à force de patience, beaucoup de patience (quand est-ce déjà que la semaine touche à sa fin ?). Rien de neuf pour les mamans. Mais j’ai aussi décidé qu’elle n’allait pas la louper cette consultation avec le médecin de la PMI. Pour cela, j’ai fait les démarches nécessaires : passer un coup de fil à l’école, échanger d’abord avec la secrétaire qui m’a dit qu’elle allait voir cela avec la maîtresse et qu’elle me rappellerait. Elle m’a rappelé pour me dire que c’était bon, on pouvait passer, Thelma et moi vers 10h.

A ce stade de l’article, vous vous demandez sans doute pourquoi je vous raconte tout ça, enfin de compte, c’est assez banal comme histoire…

Le déroulement de la consultation : l’enfant bilingue en action !

Après les bonjours à la maîtresse et à l’atsem, on nous invite à attendre dans un couloir qui fait office de sas entre la salle de cours et la salle où le médecin reçoit les petites têtes blondes. On attend, on attend et voilà que le tour de Thelma arrive. Le médecin lui dit de rentrer, je ne bouge pas mais elle m’invite aussi à accompagner ma fille, j’ai un peu insisté pour rester dans le couloir mais non, elle me dit de passer, il y a pas de souci madame.

Non, il n’y a pas de souci madame jusqu’à ce que…

Très professionnelle, le médecin explique à Thelma, après lui avoir demandé de dessiner un petit bonhomme, qu’elles vont faire des petits jeux.

Le premier petit jeu consiste à écouter des mots que le médecin lui dit à différents volumes au creux de l’oreille et après, Thelma doit répéter très fort ce qu’elle a entendu/compris. J’étais assisse un peu loin d’elles et le médecin lui dit très sympathiquement, tu sais Thelma, il faut que tu dises ce que tu entends à ta maman.

Hahahahahaha ! Je l’attendais celle-là :

Le jeu commence.

Le médecin lui chuchote le mot « lapin ».

Thelma me regarde de son air coquin et crie « conillet »

Un premier regard du médecin envers moi.

J’ai rien dit pour l’instant.

Deuxième mot chuchoté « chapeau »

Thelma crie « capell ».

Le médecin me re-regarde.

Et là, je lui ai expliqué qu’elle avait affaire à  une petite trilingue.

Ah bon ! Tu sais, Thelma, tu vas me les répéter à moi alors les mots.

Entre elle et moi, toujours notre langue maternelle

Evidemment, le médecin, très gentille, avait voulu m’intégrer dans la consultation sauf qu’elle n’avait pas pu prévoir que ça nuirait à son « petit jeu » et donc, elle serait dans l’incapacité de voir si Thelma entendait les bons mots.

C’était une situation très comique. J’étais gênée et en même temps très très fière de ma fille qui, quoi qu’il arrive et peu importe les circonstances, elle ne change pas sa manière de faire et continue à me parler dans ma langue. Du haut de ses quatre ans.
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Code-mixing : le mélange des langues de ma petite trilingue

Et bien, voilà, le moment tant redouté est arrive ! Petite Thelma grandit et en grandissant son trilinguisme prend des allures… différentes ! Moment passager ou pas, hier, pour la première fois (ou alors j’ai vraiment un problème de mémoire), elle nous a mélangé les TROIS langues dans la même phrase ! Les TROIS quoi !

Elle a dit exactement cela :

« es senyor mos ha dit que quan la música se vuelva a encender, idò después hacemos le tour des sillas »

Elle répondait à ma question de si c’était bien le centre de loisirs et à quoi ils avaient joué.

Je vous décortique :

« es senyor mos ha dit que quan » = catalan
« la música se vuelva a encender » = espagnol
« idò » = catalan
« después hacemos » = espagnol
« le tour des » = français
« sillas » = espagnol

En effet, la langue la moins présente est le français car c’est à moi qu’elle parlait, je pense. Mais en même temps, elle a du utiliser cette langue puisque c’est dans cette langue que son jeu s’était déroulé. On peut également observer que la syntaxe est parfaite, les trois langues étant des langes romanes sans trop de différences dans la structure syntaxique, elle a fait un sans faute.

Code-mixing : le mélange des langues de ma petite trilingue

 

Ce que je vis dans une langue, j’ai plus de mal à l’exprimer dans une autre

En plus, dans son élocution, elle était un peu hésitante. C’est rare chez elle, mon petit moulin à paroles à qui le fait d’être trilingue ne l’a jamais freinée de quoi que ce soit dans l’acquisition langagière ni dans la communication avec les autres.

Est-ce normal le mélange des langues chez un enfant bilingue ?

Oui, c’est normal. Il n’y a rien d’inquiétant (même si, généralement, ce n’est pas ce que les parents souhaitent dans son « idéal » de bilinguisme). Un enfant qui est élevé dans le bilinguisme simultané précoce passe par des phases différentes dans cette acquisition.

Il y a un « jeu d’équilibre » presque permanent entre les langues. Parfois, en fonction des expériences vécues, du moment psychologique de l’enfant, de l’environnement à un moment donné, l’enfant trouvera plus vite les mots dans une langue que dans l’autre.

Le code-mixing des enfants bilingues

A différence du passage volontaire (code-switching) qu’un adulte bilingue peut faire quand il parle : parce qu’il juge que tel mot sera mieux compris dans telle langue par son interlocuteur (bilingue aussi, bien sûr), un enfant en phase d’acquisition des langues n’est pas conscient de ce mouvement de bascule d’une langue à l’autre.

C’est ce qu’on appelle le code-mixing. En effet, notre Thelma qui a presque 4 ans est encore en période d’acquisition et au niveau cognitif on peut dire qu’elle ne fait pas d’effort (c’est-à-dire que ce n’est pas volontaire) pour passer d’une langue à l’autre. C’est cette « volonté » qui fait la différence avec le code-switching.

Une aventure formidable que celle de vivre avec un enfant trilingue !

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Mon enfant trilingue, ses progrès et l’introduction des flashcards (méthodes d’utilisation)

Souvenez-vous, il y a longtemps je vous ai déjà expliqué comment on fait à la maison pour trouver des astuces afin de pouvoir utiliser dans un contexte tout à fait naturel la troisième langue de Princesse Thelma.

Avant d’avancer dans l’article, j’aimerais souligner que nous ne nous sommes jamais mis la pression. Tout comme pour la grossesse, j’ai évité de lire beaucoup de livres sur le bilinguisme. Je me connais et si j’agis de la sorte c’est pour me protéger et ne pas laisser que des facteurs et des voix externes viennent perturber mon équilibre. Même si j’ai une formation en langues et en linguistique et que par conséquence je m’y connais un peu, je laisse faire les choses naturellement.

Ne pas se mettre des contraintes ni des obligations, ne pas fixer des horaires ni des devoirs et tout simplement laisser fluir… telle est pour moi, une des meilleures manières pour acquérir les langues à la maison pour élever un enfant bilingue (ou trilingue). La seule obligation est de VOULOIR.

Bref rappel de l’utilisation linguistique à la maison

Elever un enfant trilingue (astuces)

Qu’en est-il de la troisième langue ?

Mon objectif est que Thelma grandisse avec un espagnol naturel et courant tout comme si elle habitait dans ma région d’origine, les Iles Baléares : où l’espagnol a un statut de co-officialité avec le catalan, où les enfants apprennent souvent cette langue dans la rue et à l’école, où ils sont confrontés aux mass média en espagnol, au voisin qui éventuellement est de langue castillane (espagnol et castillan sont la même chose), au prof de musique qui éventuellement peut venir de Madrid et qui parle donc le castillan même s’il comprend le catalan parce qu’il habite aux îles depuis vingt ans…

Pour ce faire, j’utilise cette langue avec et à travers les moments de jeux et de détente. Depuis qu’elle est née, j’ai mis en place plusieurs stratégies :

– Doudous et poupées parlent espagnol (exclusivement)
– Les comptines chez nous c’est en espagnol (partagé avec le catalan)
– A la maison nous avons plus de livres d’enfants en espagnol et en catalan qu’en français.
– Les dessins animés (Peppa Pig, Dora, Caillou, Docteur Peluches, Teletubbies, El reino de Ben y Holly, Las tres mellizas, Teo, Babar) sont toujours en espagnol. Elle ne regarde jamais de dessin animé sur les chaînes classiques de la télé française. J’achète les DVD ou alors elle regarde sur Youtube.

Cet été, elle a fait de grands progrès en espagnol. En effet, comme je viens de l’expliquer plus haut, à Minorque, les enfants on tendance à jouer en espagnol. Je ne sais pas vous expliquer pourquoi mais c’était déjà comme ça à mon époque. Nos familles sont de langue catalane, les enfants parlent catalan et quand vers 4, 5, 6 ans on commence à jouer à cache cache, aux docteurs, au loup, à la maîtresse… et bien, les enfants prennent le rôle des personnages en baragouinant l’espagnol. Elle a du prendre cette habitude de ses copines rencontrées sur la place de la ville et maintenant elle fait de même à la maison. Elle joue au supermarché et elle compte les sous en espagnol, elle dit bonjour à la dame qui vient acheter en espagnol et ainsi de suite. Bien évidemment, son espagnol n’est pas parfait mais il me semble qu’il n’est pas pire qu’un enfant qui grandit aux Baléares.

L’introduction des cartes-mots ou flashcards

Et depuis peu, depuis la rentrée en fait, depuis qu’elle montre plus d’intérêt pour les lettres, j’ai introduit les flashcards (achetées chez Linguatoys*) ou cartes-mots. Et elle adore. Nous jouons, elle et moi, assises par terre et on passe les cartes, elle me dit le nom de l’image qu’elle voit, on revoit les couleurs et les chiffres et on construit des phrases sans s’en rendre compte.

Il y a mille et une manières de jouer avec les flashcards. Nous, encore une fois, on improvise en fonction de l’humeur, du temps qu’on a devant nous… On peut utiliser les cartes-mots de différentes manières selon l’âge ou s’il s’agit d’une activité à deux ou en groupe.

Mon enfant trilingue, ses progrès et les cartes-mots (méthodes d’utilisation)

Voici quelques méthodes (liste non-exhaustive) pour utiliser les cartes-mots :

Pour les plus petits :
 - Montrer une carte pour que l’enfant dise le nom : « qu’est-ce que c’est ? »
 - Distribuer les cartes dans la pièce et donner des instructions : « allez vers le papillon » - « où se trouve la voiture ? »
 - Faire compter le nombre d’images sur une même carte
 - Associer les chiffres aux images correspondantes
Pour les plus grands :
 - Faire épeler les lettres du mot qui apparaît sur la carte
 - Faire des groupes avec les cartes d'une même famille. Par exemple, école, enfant, cartable et papillon et faire chercher l’intrus
 - Dessiner le mot sur un papier, un tableau, ensuite, passer rapidement les cartes avec le mot écrit et quand ils voient le mot qui correspond au dessin, ils disent stop.
 - Classer les flashcards par groupes : nourriture, animaux, moyens de transport, etc.

Les flashcards sont donc notre dernière méthode introduite pour jouer avec l’espagnol. Cela fait quelque temps qu’elles somnolent bien rangées dans l’armoire de la chambre de Princesse et je trouve que c’est idéal de les utiliser à partir des 3 ans car elle a déjà conscience de ce qu’elle fait et est aussi capable de comprendre les consignes.

Une langue ne peut jamais être apprise ou acquise sous la pression. Une langue est envie, sentiments, culture, communication. Une langue n’est pas obligation, classement, corvée, pacte. 

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